Cenco : un communiqué qui fait penser à un ralliement politique

Appelée à jouer le rôle d’arbitre impartial et neutre face à la politique, conformément à la directive du Saint Siège, l’église catholique de la République Démocratique du Congo, particulièrement ses dirigeants membres de la Conférence Episcopale Nationale du Congo (Cenco), est en train de s’écarter de cette recommandation majeure de Vatican pour un ralliement politique clair et qui ne fait l’ombre d’aucun doute. On peut le constater dans son dernier communiqué, signé à Lubumbashi en date du vendredi 22 juin 2023, sanctionnant les assises de la 60eme assemblée plénière de la Cenco.
        Dans sa déclaration en 24 points, du début à la fin, la Cenco ne se montre pas tendre envers le pouvoir en place, sur lequel elle déverse tout son venin, en le chargeant de tous les péchés, même ceux qu’il n’a pas commis.
        Faisant le point sur la situation d’insécurité qui prévaut au pays, particulièrement dans la partie Ouest, avec l’apparition du phénomène «Mobondo», la Cenco accuse frontalement le parti présidentiel, UDPS, de contribuer à l’insécurité en entretenant une milice. Celle-ci, soutient-elle, s’attaquerait aux opposants et à tous ceux qui sont considérés comme leurs proches, y compris des membres du clergé.

Pour devenir prêtre, il y a des conditions à remplir

        Ne devenir prêtre qui veut. Il faut remplir des critères fixés pour être d’abord admis comme aspirant, puis observer la discipline de l’église et suivre le cursus tracé pour enfin être ordonné prêtre.
        Si pour devenir prêtre il y a des conditions à remplir, quoi de plus normal qu’il ait de critères ou conditions à remplir pour accéder à la magistrature suprême d’un pays? N’importe qui peut se porter candidat et c’est le peuple tranche par le vote !
        Usant des menaces à peine violées, la Cenco voudrait imposer à l’ensemble du peuple congolais sa volonté ou un candidat que les évêques traineraient dans leur malette, mieux «un ange» exempté du critérium fixé par la Constitution. En clair, pour la Cenco, s’en tenir aux critères serait synonyme d’exclure des challengers de la course.
        Donc, d’après la Cenco, des critères tels que «être de nationalité congolaise d’origine, c’est-à-dire Congolais de père et de mère», tout comme «l’exclusivité de la nationalité congolaise» qu’impose la constitution, ne devraient pas être brandis lors de la présentation des candidatures à différentes échéances électorales. Il faudrait seulement ouvrir grandement la porte à tous, pendant l’église elle-même s’en tient rigoureusement aux critères ! Une attitude qui pousse les analystes à croire que l’église aurait un candidat qu’elle voudrait imposer coûte que coûte.
        Il sied de rappeler, à ce sujet, que certains hauts dignitaires catholiques s’étaient acharnés, il y a peu, à attaquer, au cours de leurs homélies, une simple proposition d’un compatriote visant à réaffirmer par une loi ordinaire un principe déjà consacré dans la constitution, en l’occurrence le critère de nationalité congolaise d’origine, pour se porter candidat à la présidentielle. Il s’agit de
ce que d’aucuns appellent «Loi Tshiani», alors que la proposition n’a pas encore fait l’objet d’un débat au parlement en vue de son adoption ou rejet.
        Le communiqué de Lubumbashi vient d’éclairer l’opinion sur la position de l’église catholique, notamment celle de ses dirigeants membres de la Cenco, dont le mandat est devenu depuis quelque temps sans limite.

La Cenco manque le courage de se prononcer

        Parlant du processus électoral au chapitre 2 point 9 de leur déclaration, les princes de l’église catholique estiment que les conditions ne sont pas réunies pour des élections voulues
démocratiques et inclusives. Ils dénoncent l’inexistence d’un cadre de concertation tripartite (majorité, opposition et société civile), et l’absence d’une contre-expertise par un organisme international spécialisé pour auditer le fichier électoral.
        Tout observateur averti voit à travers ces conditions que la Cenco utilise des détours et manque le courage d’exprimer clairement sur son agenda caché. L’église catholique exige le  dialogue comme préalable avant d’aller aux élections en vue de caser ses «protégés» dans les
institutions de la République, foulant ainsi aux pieds le délai constitutionnel pour lequel elle était en première ligne pour marteler qu’elle ne tolererait pas le glissement du délai constitutionnel pour l’organisation des élections.
        On voit clairement que la Cenco se fait l’avocat de l’opposition qui a peur des élections. Ayant constaté qu’elle n’a pas d’ancrages sociologiques – ses nombreuses manifestations programmées ayant raté par manque de militants – l’opposition multiplie des stratégies visant
le chaos pour justifier la non tenue des élections auxquelles elle ne veut pas participer. Elle vient de se trouver un porte-parole ou mieux un avocat pour relayer subtilement sa volonté cachée.

La Cenco a choisi son camp

        Ce qui demeurait hier dans les suspicions vient d’éclater au grand jour à la faveur de la déclaration de la déclaration sanctionnant la 60eme assemblée plénière de la Cenco tenue à Lubumbashi, dans la province du Haut Katanga.
        Au chapitre 3 point 11 de leur déclaration, les évêques de la RDC soutiennent qu’il y a recul démocratique, caractérisé notamment par la répression violente des manifestations de l’opposition, la restriction de la liberté des mouvements des opposants, des tentatives de projets de lois discriminatoires, l’instrumentalisation de la justice et les arrestations arbitraires.
        Il faut être vraiment frappé de cécité intellectuelle pour ne pas voir dans cette déclaration, l’alignement pur et simple de la Cenco sur un camp politique, celui de l’opposition dont elle défend fait et cause.
        Sans le dire expressément, on comprend que la Cenco fait allusion à la marche dite  pacifique de l’opposition du samedi 20 mai, alors qu’elle n’en était pas une. Car, à la place d’une marche voulue pacifique, dont personne n’ignore le caractère à savoir l’absence d’armes, à feu ou blanche, chez les manifestants, ce qui n’était pas le cas pour les organisateurs de ladite marche, qui s’étaient illustrés par le recrutement des «kuluneurs» armés des machettes et
autres armes blanches, dans le but de s’attaquer aux agents de l’ordre déployés pour encadrer les différentes manifestations qui étaient programmés à travers la ville de Kinshasa. Pire, la Cenco passe sous silence l’acte criminel posé les opposants en recrutant des mineurs, qu’ils poussaient à caillasser des policiers.
        Ce qui étonne dans cette déclaration c’est le fait de voir que les évêques ne disent aucun mot ou ne condamnent nullement l’opposition pour tous ces forfaits, en l’occurrence le recrutement des hors-la-loi dans le but de mettre la ville à feu et à sang, ainsi que l’utilisation des mineurs comme boucliers humains pour s’attaquer aux forces de l’ordre. Bref, le silence des évêques sur ces actes criminels  trouble les bonnes consciences. Pour les évêques, l’État devrait laisser libres ces bandits armés faire tout ce qu’ils voulaient pour enfin imputer les conséquences au gouvernement. Car, son intervention qui n’a d’ailleurs fait aucun mort pour empêcher les kuluna de mener des exactions est malheureusement qualifiée par la Cenco de répression violente et l’action des «kuluna» de bénéfique !
        Chers évêques, là on ne vous reconnaît plus, SVP ! Quel type de démocratie pronez-vous ou encore voulez-vous instaurer en République Démocratique du Congo ?
        Quant à la prétendue restriction de la liberté des mouvements des opposants, la Cenco tape totalement à côté. Pour preuve, si tel était le cas, on n’aurait pas laissé Moïse Katumbi décoller avec son jet alors que son conseiller spécial était pris en flagrance de détention d’armes à feu sans autorisation et de surcroît dans les installations aéroportuaires.
        De même, Augustin Matata Ponyo ne se serait pas rendu à Bunia, encore moins des opposants n’auraient pas effectué le déplacement dans les provinces du Kwango et Kwilu.
        Non, chers évêques, vous êtes allés trop loin. Revenez au bon sentiment et observez votre statut.
        C’est ici qu’il faut se demander si cette déclaration des évêques, qui ne cesse d’étonner et gêner les bonnes consciences, rencontre l’assentiment des chrétiens catholiques.
        Les analystes doutent que ce document soit réellement l’œuvre des évêques catholiques. D’aucuns n’hésitent pas de la qualifier de document ficelé dans une officine politique que les princes de l’église n’ont fait qu’endosser malgré le contenu qui ne reflète en rien le style et le mode de rédaction reconnus aux catholiques ! Au cas où les signataires confirment qu’ils sont réellement auteurs du document, les évêques semblent avoir coupé le cordon avec la base, les
fidèles dont la plupart se disent choqués par la récente déclaration qui ne reflète nullement l’esprit de l’église.

L.P

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